Fanny Reyre-Ménard Luthière

Publié le par Céline D

 

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   L'Atelier du Quatuor se situe dans le quartier Chantenay à Nantes, c'est une petite devanture toute simple Bd de l'Egalité, d'où apparaît lorsque que l’on pousse la porte  un chaleureux bric à brac d'instruments hétéroclites.

Nous sommes reçus par une femme agréable et passionnée par son métier.

 

Parcours et formation


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A huit ans, elle voit un orchestre d'enfants à l'école, et découvre un instrument magnifique...

 

Quatre ans plus tard, elle débute le violon. Après avoir passé un an à Paris à étudier l'ébénisterie, elle intègre une école de lutherie pendant trois ans "The Welsh School of Violin making and repair" et passe son diplôme en Angleterre. Elle « pensait » alors très souvent son métier en langue anglaise. Elle a 25 ans de métier à présent, et s'occupe principalement de la restauration d'instruments.

 

 

Luthier, un métier confidentiel en mutation


« Les luthiers ont leur propre langue. Il y a un savoir-faire dans chaque pays. Il y a eu dans les années 60 un partage de connaissances pour une conception internationale de la lutherie. Partager dans de ce milieu, était alors une révolution à ce moment-là ! » confie-t-elle. « C'est le mode de formation en école qui a changé le métier » où le savoir-faire était souvent lié au secret transmis du maître à l'élève apprentis. « Aujourd'hui, j'utilise internet pour partager des connaissances avec des collègues du monde entier. Le monde de la musique est cosmopolite. Nous sommes tous originaires du même pays : la musique. Chaque musicien est porteur de son identité, mais on se comprend par la musique ; j'ai visité par exemple quatre luthiers différents à Seattle, mais nous avions la même conception du métier. »


Il existe différentes familles de luthiers, certains fabriquent des violons expérimentaux, ce qui n'est évidemment pas du goût de l'école classique par exemple !

 

Sans-titre-1.jpgDans son atelier, elle s'occupe principalement de violons, d'altos, et de violoncelles, les Sans-titre-3.jpginstruments à cordes frottées du quatuor. Mais elle change aussi les cordes sur les guitares, instruments à cordes pincées. La viole de gambe a disparu à la fin du 18e mais est réapparue avec le renouveau de la musique baroque. La vielle à roue présente au XVIII ème dans la musique savante est depuis le XIX ème utilisée par différentes musiques folkloriques ( en France Berry , Bourgogne par exemple).   

 

 

Un alto est plus grand qu'un violon, sa caisse de résonance est plus volumineuse et permet d' obtenir des harmoniques plus graves que celle d'un violon. C'est la même chose de l'alto au violoncelle, plus grave encore.

 

Elle se tourne alors vers un violoncelle allongé bien fatigué...  

Sans-titre-4.jpg« Il est là depuis octobre, a été réparé plusieurs fois au 19e et au 20e siècles, mais mal ! Il doit avoir été fabriqué  au milieu du 18e. Il y a présomption dans le choix du bois. Il doit encore être certifié, il faudra faire une expertise pour savoir s'il porte un nom... La valeur de l'instrument varie très fortement selon l'identité du maître qui l'a fabriqué. Pour identifier, je toque juste avec l'index sur la table de l'instrument et cela me permet d'avoir des informations. P1100059.JPGLes cordes sont en vibration, cela doit sonner le plus fort possible dans le minimum de volume. La voûte est faite pour résister à la tension, avec une voûte parfaite, plus rien ne vibrerait, elle doit être déformée.

 


 

 

Quand je fabrique un instrument, je maîtrise tout tandis que pour une restauration, je dois prendre en compte la personnalité de l'instrument. »

 

Travail de restauration

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Il existe parfois une étiquette, mais c'est rare. Elle-même, ne met pas de marque, car « il faut se faire le plus discret possible quand on restaure un instrument. Cela doit être réversible, on ne signe plus. »

 

 

 

 

 

 

 

Les deux pièces majeures d'un instrument à cordes sont :

 

Le chevalet : c'est l'ampli du violon. Il est plus ou moins épais et détermine l'ouverture entre les cordes.


L'âme : c'est le bout de bois cylindrique posé à l'intérieur du violon. En fonction de sa position, il Sans-titre-8.jpgmodifie la réponse de l'instrument. Il joue sur l'importance du volume sonore, la rapidité de la réponse et les harmoniques. Un son saturé, contenant beaucoup d'harmoniques extrêmement amplifiées sera choisi en fonction de ce que joue le musicien, sa façon de jouer, son idée.


Les outils utilisés par le luthier sont proches de ceux utilisés par l'ébéniste, car on travaille sur des surfaces planes. En revanche, pour les surfaces incurvées, on utilise les canifs et les rabots, ou bien encore des gouges pour creuser l'intérieur ou sculpter la volute.


Pour réparer les fissures, elle utilise des « taquets ».

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Elle change le manche du violoncelle sur sa table, puis le remet.  

Il doit être bien dans l'axe et ajusté suivant un angle bien précis car cela détermine la pression sur la table de l'instrument.

 

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Elle nous montre alors un violoncelle 18e « de dame » avec une sculpture sur la volute.

La fabrication en copie d'ancien est importante car le milieu musical a un côté très conservateur.

 

 

 

 

 

 

  « A la fin de la journée, je vois ce que j'ai fait. Il y a un côté concret et solide dans notre métier comme tout artisan »



Luthier, une relation privilégiée avec le musicien, une écoute


« Une fois sur dix seulement, le musicien peut me dire ce qu'il veut, mais la plupart du temps, il joue de son instrument pour me montrer ce qui ne va pas, ce qui ne lui semble pas bon. Le luthier doit avoir une oreille analytique (qui décompose les différents paramètres à prendre en compte) Quelle est la part du son qui vient de la corde ? La part du poids que le musicien donne à son archet sur cette corde par exemple, la part de stress du musicien aussi qui interfère à l'écoute ? Cette répartition des rôles permet au musicien de sortir des contingences matérielles et de ne s'occuper que de son jeu. Ce rapport acoustique est fondamental. Trouver le bon son avec un musicien doit être rapide, sinon il s'en va ! Il doit y avoir un bon contact entre les deux.


Quand on assiste à un concert, les cinq premières minutes sont consacrées justement à l'analyse : un violon soigneusement réglé procure une intense satisfaction physique. »

 


Clientèle


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 « Ce sont des amateurs, des élèves, de grands professionnels, c'est très varié. I l y a par exemple le violoncelliste Jian Wang, ou bien le violoniste David Grimal, qui ont tous les deux des exigences intellectuelles et professionnelles. Là, une cliente vient de réserver un violon pour un enfant. » Certains des enfants qu'elle a connus sont devenus professionnels, professeurs en école de musique, ou au Conservatoire, ou bien musiciens de l'O.N.P.L. l'Orchestre National des Pays de la Loire.

 

Les personnes issues de la musique classique représentent 80% de sa clientèle, les 20% restants sont issues de la musique traditionnelle, de la musique bretonne par exemple.

 

 

Interview du 24 juin 2010

Voir également l'album photo

 


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